Prix du roman Métis des lycéens 2020 : rencontre avec la lauréate Caroline LAURENT et le lauréat 2019 Denis LACHAUD pour les 1STMG2

Les élèves avec Sergine Rivière, leur professeur de français

Le lycée participe depuis plus de 10 ans au Prix du Roman Métis des Lycéens : les élèves lisent la sélection de romans francophones puis votent pour leur roman préféré. Le ou la lauréat.e est ensuite invité à venir rencontrer ses lecteurs à La Réunion. Depuis 2 ans les rencontres ont dû être annulées en raison du contexte sanitaire.

En avril 2021, la venue des 2 co-lauréates du Prix Roman Métis des Lycéens 2020, Kaouther Adimi et Caroline Laurent, n’a donc pu avoir lieu. Une autre rencontre a pu être organisée mais avec Caroline Laurent et Denis Lachaud, lauréat 2019 (la rencontre avec ce dernier, prévue en avril 2020, avait évidemment été annulée) : c’est le jeudi 7 octobre 2021 que les élèves de 1STMG2 ont pu rencontrer au CDI les 2 lauréats. Les échanges ont essentiellement porté sur le drame des Chagossiens relaté par Caroline Laurent dans Rivage de la colère, et le racisme poussé à l’extrême dans la dystopie Les Métèques imaginée par Denis Lachaud.

Les 1STMG2

Avec ce 2e roman, Caroline Laurent, dont la mère mauricienne lui racontait avec indignation comment les habitants des îles Chagos avaient été brutalement exilés, veut rendre justice aux Chagossiens qui se battent toujours pour leur archipel. Elle livre sous forme de tragédie moderne, en 5 parties, une histoire d’amour magnifique et poignante entre Marie la belle Iloise et Gabriel le Mauricien au fin profil d’oiseau.

Situé dans l’archipel des Chagos rattaché à l’île Maurice, le roman restitue un drame historique méconnu et une lutte qui reste vive cinquante ans après. En effet, lorsque Maurice accède à l’indépendance après 158 ans de domination britannique, les Chagos sont détachés de Maurice et l’île de Diego Gracia est « louée » par les Anglais aux Américains qui souhaitent y installer une base militaire. L’archipel est donc vidé de ses habitants qui seront déportés, en 1971, pour la plupart à Maurice, dans des conditions indignes. 

Ce drame est d’ailleurs préfiguré dès les premières pages par le massacre d’un bœuf auquel assiste Gabriel à peine débarqué sur Diego Garcia. Massacre pour Gabriel, horrifié par les giclements de sang et les cris de l’animal, providentiel apport de viande fraîche pour les Ilois, pour Marie, Marie dont le surnom étonne et amuse les élèves, « Maris-Gros-Pieds », Marie qui va partout pieds nus, femme libre et insoumise, victime elle aussi mais qui se battra jusqu’au bout avec dignité.

L’autrice a choisi des personnages beaux et forts pour incarner ce drame, sous forme de roman plutôt que dans un article ou un blog sur internet, afin que la dimension plaisir de lire soit possible, dimension très importante afin de sensibiliser davantage les lecteurs. Bien sûr, comme le lui faisaient remarquer des élèves, internet permet de toucher davantage de gens, mais elle voulait écrire une tragédie, humaine, sociopolitique et amoureuse, qui donne tout son pouvoir aux mots:  les Chagossiens avaient les sentiments justes mais la plupart ne savaient ni lire ni écrire, ils n’avaient pas les mots. 

Par deux fois la famille Herbet est convoquée à la préfecture de Marseille. Dès le premier courrier Célestin, le fils aîné, a pressenti un danger. Mais il ignore alors que sa mère, tout comme son père, a jadis changé de patronyme. Dans une région où l’altérité est dangereuse, dans un pays où cinquante ans plus tôt on encourageait les immigrés à s’assimiler, voici qu’un fonctionnaire leur demande de reprendre leur nom d’origine. Quelques nuits plus tard la famille Herbet est cruellement assassinée à son domicile. Seul Célestin, qui entretient avec le réel une relation particulière, parvient à s’échapper par les toits. Commence alors un long voyage, une succession de jours durant lesquels il s’agit pour le tout jeune homme de passer inaperçu, une fuite ponctuée de rencontres précieuses dans une contrée quadrillée de contrôles policiers. Denis Lachaud transpose de livre en livre les déviances récurrentes de l’humanité. En choisissant des personnages très jeunes, qui interprètent le réel avec une acuité instinctive, l’écrivain compose depuis vingt ans une œuvre forte et singulière ancrée dans l’Histoire et l’actualité, toujours colorisées par l’imaginaire et la différence.

Créé en 2011 dans l’académie de La Réunion, le Prix du Roman Métis des Lycéens mobilise des jeunes et des équipes pédagogiques de toute l’île autour d’une littérature francophone contemporaine, ouverte sur le monde et porteuse de valeurs d’humanisme, de métissage et de diversité. Il invite les élèves de seconde et première à se plonger dans l’univers de 3 romans francophones parus depuis moins d’un an sélectionnés par le jury du Grand Prix du Roman Métis, prix littéraire international de la Ville de Saint-Denis.

Le Prix du Roman Métis des Lycéens et les rencontres avec le lauréat sont organisées par La Réunion des Livres pour l’académie de La Réunion, la direction des affaires culturelles de La Réunion (DAC Réunion) et la ville de Saint-Denis de La Réunion avec le soutien de la Sofia.

Auteur: Maryline Ragenard

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