J’étais en train de préparer mon armure et de la décrasser quand une petite voix au fond de la pièce me dit : “Je veux pas que tu partes….” C’était mon fils, Gauvin, qui me suppliait de ne pas m’en aller . Hélas ! j’avais prêté serment à mon suzerain, et juré que je ne reculerais jamais, au grand jamais, devant rien :”Fils! tu sais bien que je suis obligé n’est-ce pas ?” Je venais tout juste de rentrer d’une guerre meurtrière qui m’avait profondément marqué, et voilà que je devais repartir au front, avec comme seul réconfort mon armure et quelques autres bricoles auxquelles nous avions droit à bord .
“Je reviendrai toujours, Gauvin, toujours ! En attendant prends bien soin de ta mère et de ta soeur, ce sera toi l’homme de la demeure dorénavant !” le rassurai-je, en le prenant dans mes bras . ” Mais je suis trop petit pour ça père, je ne vais point y arriver !” me dit-il d’une voix triste . ” Il va falloir que tu apprennes à grandir !”
Après avoir lustré mon armure je mis la dernière main au harnachement de mon cheval . Ma femme vint me dire au revoir . Elle vérifia que tout était prêt, m’embrassa une dernière fois, et rentra chez nous : elle et mon fils regarderaient les voiles s’éloigner depuis notre donjon .Je me mis en route avec mon écuyer, un peu perdu, déboussolé, conscient du fait que dans les mois à venir, le danger précèderait chacun de mes pas .
Arrivé au port, un marin m’aida à embarquer mes affaires et mon cheval, sans dire un mot il transporta tout ce que j’avais et aida les autres chevaliers qui embarquaient avec moi pour Saint Jean D’Acre , où nous allions à nouveau nous battre .
Je dis un au revoir à ma terre natale, sur le pont du bateau qui m’emmenait vers une mort probable .
Soane Boulay