L’expertise comptable ne connait pas la crise

  • Inès, Guillaume et Aurore, étudiants en dernière année en classe préparatoire au DCG au lycée Antoine-Roussin de Saint-Louis.
  • Rémy Amato, président de l'ordre des experts-comptables de La Réunion (photo Ludovic Laï-Yu).

Rémy Amato, président de l’ordre des experts-comptables de La Réunion (photo Ludovic Laï-Yu).

Par Anaelle Grondin

Saint-Louis  24 sep 2018

MÉTIERS. Toutes les sociétés ont besoin d’experts-comptables, même à l’heure de la dématérialisation, assure le président de l’ordre des experts-comptables de La Réunion, Rémy Amato. Un constat qui pousse de nombreux jeunes à s’intéresser à cette filière.

Balade en catamaran, pique-nique sur la plage et beach volley. Les jeunes arrivants en classe préparatoire au diplôme de comptabilité et de gestion (DCG) du lycée Antoine-Roussin à Saint-Louis ont eu droit à une journée d’intégration plutôt décontractée vendredi dernier, en compagnie des deuxième et troisième années ainsi que des enseignants. Sur place, tout le monde s’est réjoui de cette riche idée, qui a par ailleurs servi d’exercice pratique aux plus anciens. “Nous avons eu trois semaines pour tout boucler : monter un budget, le présenter à l’administration, démarcher les entreprises… C’était très formateur”, raconte Inès, en troisième et dernière année de prépa au DCG. Son camarade, Guillaume, acquiesce : “Ça nous a permis de mettre en pratique les connaissances des deux premières années.” La prépa saint-louisienne compte au total 80 étudiants, répartis en trois années d’études.

De multiples possibilités après le DCG

Réputé prestigieux et difficile à obtenir, le DCG permet d’accéder à la préparation du diplôme supérieur de comptabilité et gestion (DSCG, bac +5), à plusieurs masters (gestion, comptabilité-contrôle-audit) ou encore aux écoles de commerce. “Il n’y a pas qu’expert-comptable [dont le cursus dure en tout 8 ans], les débouchés sont nombreux : auditeur, directeur administratif et financier, gestionnaire, contrôleur de gestion”, fait savoir Elisabeth Bougnon, l’un des professeurs qui forment et encadrent les étudiants de la prépa du lycée Antoine-@Roussin. Au-delà de la passion de certains pour les chiffres, c’est surtout ce panel de possibilités et les besoins sur le marché du travail qui poussent une majorité de ces jeunes à poursuivre cette voie. Car “aucun jeune ne se réveille un matin en disant qu’il rêve d’être expert-comptable, ce n’est pas comme médecin ou avocat”, reconnaît en souriant Rémy Amato, président de l’ordre des experts-comptables de La Réunion. Le parcours d’Inès et de ses camarades de promo le confirme : “Après le bac, on ne sait pas trop vers quoi s’orienter. Cette formation est assez ouverte et permet de laisser du temps pour savoir ce que l’on veut faire”, explique-t-elle.

Peu de chômage

Guillaume, en troisième année également, confie : “J’ai entendu parler de cette filière lors d’une réunion d’orientation. On m’a dit qu’il y avait très peu de chômage dans ce secteur.”  “À leur remise de diplôme, certains s’étaient déjà vu proposer un emploi”, renchérit Brandon, en deuxième année. Rémy Amato confirme que les métiers de l’expertise comptable ont encore de beaux jours devant eux : “L’ensemble des entités économiques ont besoin d’experts-comptables, même à l’heure de la dématérialisation.” Il souligne que la fiscalité est de plus en plus compliquée et évoque la mise en place prochaine du prélèvement à la source, ce qui va créer des besoins supplémentaires.

En classe prépa au DCG à Saint-Louis, Djoris fait partie de ceux qui visent le Graal, à savoir le diplôme d’expert-comptable (DEC, bac +8)“même s’il faudra beaucoup travailler.” Le salaire est une excellente source de motivation, dit-il. En fonction du portefeuille clients, les revenus annuels peuvent représenter 70 000 à 150 000 €, selon Rémy Amato. Il fait remarquer que sa profession souffre toutefois d’une “une image désastreuse”, celle d’un “besogneux, hyper-technicien, chiant, collé à son ordinateur toute la journée alors qu’il y a des missions de rencontre et de compréhension.” Les étudiants du lycée Antoine-Roussin confirment qu’il s’agit d’un cliché.

Anaëlle Grondin


Paroles d’anciens

Adnan, bachelier S et diplômé du DCG cette année après être passé par la classe prépa du lycée Antoine-Roussin à Saint-Louis, poursuit le cursus de l’expertise comptable à Lyon, en DSCG. “De nombreux parcours sont possibles, mais la voie classique reste l’obtention des diplômes nationaux que sont le DCG (bac +3), le DSCG (bac +5) et le DEC (bac +8), explique-t-il. Pour préparer le premier, “le fait d’être dans un lycée est un atout car l’encadrement scolaire facilite le suivi des cours et impose un rythme de travail régulier”, selon lui. Mauriciane, bachelière S et également diplômée du DCG cette année, continue, elle, en DSCG en alternance à la CCI de Saint-Denis : “Ma promotion a bénéficié de professeurs très pédagogues et surtout très compréhensifs par rapport à nos difficultés face au diplôme et à la charge de travail. Le soutien moral des professeurs est très important durant les 3 années.” Un avis partagé par plusieurs autres anciens du lycée saint-louisien. Ceux qui ont choisi de travailler après l’obtention du DCG ont pu intégrer des entreprises. Wendy, diplômée en 2016, “travaille aujourd’hui dans un cabinet d’expertise comptable à Saint-Louis où elle est chargée des questions sociales.” Alicia, qui était dans sa promo, a été embauchée après la prépa en tant que contrôleur de gestion pour le groupe Legros à La Réunion. À noter que la prépa du lycée Antoine-Roussin est unique dans le sud de l’île. Dans le nord, le DCG peut être préparé au lycée de Bellepierre.

Plusieurs centaines d’experts-comptables à La Réunion

Le président de l’ordre des experts-comptables de l’île indique que 245 professionnels sont inscrits en tant qu’experts-comptables. L’ordre en accueille 20 à 25 chaque année. Un chiffre en “forte progression”, selon Rémy Amato. Par ailleurs, il a recensé 1 300 collaborateurs en cabinet d’expertise comptable à La Réunion.