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     Le commentaire de texte est une des trois épreuves au choix, à l’écrit du bac. Noté /14 en série technologique et /16 en série générale, le sujet demande de commenter et d’analyser un des textes du corpus. En série technologique, des grands axes d’étude sont donnés. En série générale, aucune indication n’est donnée. Il faut faire ressortir une problématique et trouver un plan, en deux ou trois grandes parties et deux ou trois sous-parties, à appuyer de citations analysées, pour y répondre. Le devoir doit être entièrement rédigé. Il est bon de consacrer de 2h30 à 3h à cet exercice.

Texte : La Bruyère, « De L’Homme », Les Caractères

Proposition de corrigé

     La Bruyère est un moraliste français du XVIIe siècle qui a écrit Les Caractères pour, bien souvent, dénoncer les travers des hommes. « De l’homme » expose Gnathon, un homme égoïste qui ne fait attention qu’à sa propre personne. Nous nous demanderons comment Le Bruyère parvient, à travers un portrait drôle et incisif, à solliciter le jugement des lecteurs, qui riront et dénonceront l’attitude de cet homme. Dans un premier temps, nous montrerons que Gnathon se pense au-dessus des autres. Puis, nous montrerons l’efficacité argumentative de ce texte. [Introduction : présenter auteur et oeuvre/ situer le passage / problématique/plan]

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     Gnathon est un homme qui se pense au-dessus des autres, tel un monarque régnant sur sa cour. [Intro I]

     L’antithèse entre Gnathon et les autres est présente dans tout le texte. Alors que Gnathon est tout puissant, « le maître des plats », il s’octroie tous les droits et en « oublie » les autres. On assiste à une antithèse hyperbolique entre cet homme, ce « Il », sujet des phrases, aux divers déterminants et pronoms possessifs, qui ne pense qu »à « soi » face à « tous les hommes ensemble » de l’autre côté, l 1. Les formes négatives montrent également qu’il ne fait attention à personne, il « ne se contraint pour personne », l 15, « ne pleure point la mort des autres », l 26. Grâce à ce portrait caricatural, La Bruyère peut dénoncer son attitude. [Ia : idée directrice + exemples]

     Plus encore, Gnathon veut prendre la place des autres et les éliminer. Dans la première phrase, déjà, la phrase est divisée en deux, Gnathon est présent dès le début et les autres hommes arrivent ensuite. On se place donc d’emblée du point de vue de Gnathon, même si le texte est écrit à la troisième personne, c’est toute la ruse argumentative de La Bruyère. Le repas de Gnathon n’est que pour lui, les noms « maître » et l’adjectif « propre » le placent au centre. Il prend même la place de « deux autres ». Pour lui, donc il vaut mieux que « deux hommes ». De même, il lui faut « dans la meilleure chambre, le meilleur  lit» (l 13) ce double superlatif le place au-dessus des autres. Il ne s’occupe de personne et est prêt à échanger sa vie contre celle de tout « le genre humain » (l 16) [Ib : idée directrice + exemples ]

     Gnathon se croit donc supérieur et son attitude est ridicule. L’argumentation de La Bruyère est efficace dans ce portrait car on rit des défaut de cet homme ridicule. Le rire corrige les moeurs comme dit l’expression latine : castigat ridendo mores. [Transition]

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     L’argumentation de La Bruyère est efficace car elle ridiculise froidement l’attitude d’un homme et c’est le lecteur qui va lui-même tirer des conclusions sur la manière de se comporter. [Intro II]

     Gnathon est ridicule. Face à la nourriture, Gnathon se tranforme en bête qui « remanie, démembre, déchire » les viandes. L’énumération montre la violence de ses pulsions et le texte prend un ton satirique. L’homme est déhumanisé, il cède à ses pulsions primitives. Les phrases sont très courtes, hâchées par de nombreuses virgules, ce sont des asyndètes. Ce rythme montre la démesure du comportement de Gnathon qui cède à ses pulsions égoistes et très nombreuses. L’allitération en [r] des lignes 8 et 9 accentue la bestialité de la scène de repas. [IIa : idée directrice + exemples ]

     L’argumentation est indirecte, la morale est cachée mais évidente : « N’agissez pas comme lui, vous serez ridicules ». Le regard que portent les convives sur Gnathon est un regard de dégoût. C’est le regard que tout lecteur doit aussi porter sur lui car il fait preuve de « mal propretés dégoûtantes » (l 6), ce groupe nominal péjoratif dresse un portrait peu flatteur de l’homme qui « ôte l’appétit ». Le lecteur doit donc en tirer comme leçon qu’il ne doit absolument pas agir comme lui. Le portrait est un texte court, car en restant concis, il a plus de portée, comme une fable, par exemple. Et après la lecture, on peut rester en discuter ou songer à cette attitude. Les leçons naissent donc à la lecture mais durent dans le temps. On en retient aussi facilement des phrases comme « Gnathon ne vit que pour soi ». Dès cette négation restrictive, on sait que son attitude sera déplorable. [IIb : idée directrice + exemples ]

     La morale de ce caractère est donc implicte et c’est au lecteur de faire jouer son raisonnement. Les Caractères de La Bruyère dressent une galerie de portraits dénonçant la société du XVIIe siècle et les vices humains. [Transition]

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     En conclusion, ce caractère dénonce ironiquement l’attitude de Gnathon et l’argumentation est efficace car ce court texte incisif va droit au but : personne ne souhaite être Gnathon car c’est un être répugnant qui se ridiculise en public. La Bruyère utilise souvent ce procédé, comme dans son caractère qui met en scène Arrias, homme qui ment sans cesse et qui se retrouve à la fin humilié face à l’auditoire qu’il tentait d’impressionner. [Conclusion : rappeler ses grandes idées / répondre à la question posée / ouverture]