Un auteur au CDI
M. MADAVANE arrive accompagné de M. GOVINDIN, professeur dans notre établissement et instigateur de l’invitation de cet auteur. Sa venue a lieu dans le cadre de l’opération menée par la documentaliste Mme GAUTHER, un auteur au CDI.
Après s’être présenté, M. MADAVANE répond aux questions de la classe de 1ere BAGO. Ces derniers ont étudié son recueil de nouvelles intitulé Mourir à Bénarès, et se sont intéressés plus particulièrement à la nouvelle, Un canot de papier sur le Gange. Grâce à l’habile mélange d’éléments issus du vécu de l’auteur, de la vérité de certains événements et de la fiction, cette nouvelle a permis aux élèves d’étudier la complexité du genre autobiographique.
1 : où vivez- vous, êtes- vous marié, avez-vous des enfants ?
Je vis à New Delhi, je me suis marié une 1ere fois à 20 ans et j’ai divorcé. Nous avons eu une fille qui a 38 ans aujourd’hui et je me suis remarié à 41 ans et j’ai une seconde fille de 8 ans.
2 : Etes-vous Tamoul pratiquant ?
C’est amusant que vous parliez de pratiquant !! Le Tamoul est plus une langue et une culture qu’une religion. Je parle Tamoul couramment et dans ma famille plusieurs langues sont utilisées, c’est le mélange des cultures qui a donné plusieurs langues.
3 : Que pensez- vous du phénomène Bolliwood ?
Les films chantés font partis de notre culture mais au début de leur apparition, les gens n’étaient pas très favorables aux chants. Il existe de plus en plus en Inde, un cinéma parlé plus traditionnel qui met en avant de grands metteurs en scène. Moi-même, je dirige un troupe de théâtre dont les acteurs sont de plus en plus sollicités par le cinéma indien. J’ai un projet à long terme, d’oeuvre cinématographique qui relierait Madagascar, la Réunion et l’Inde. Je repère des lieux possibles à la Réunion.
4 : Cette nouvelle est-elle inspirée de votre enfance ?
Citez-moi les évènements dans la nouvelle qui vous ont fait se poser cette question.
– quand Fougère enfant est humilié par sa maîtresse devant ses camarades
Il était fréquent que les maîtres usent d’humiliations. Dans mon école, 2 maîtresses avaient l’habitude de plaquer dans le sable la tête des élèves récalcitrants et de leur frotter la joue contre le sable. Ce dernier s’engouffrait dans la bouche, et nous mangions littéralement du sable (l’auteur se souvient encore du nom de ses 2 maîtresses).
– quand Fougère est poussé par un élève français par-dessus le balcon et se blesse à la lèvre. L’élève incriminé est appelé
” l’Autre “. Pourquoi ne pas lui avoir donné de nom ?
Ce passage est vrai mais l’élève blessé c’était MOI (l’auteur nous montre sa blessure encore visible). Dans la nouvelle j’ai préféré attribuer cet événement à un autre car je n’aurais jamais osé parler de moi. J’ai modifié le lieu de l’événement : cela c’était passé à Saint Joseph de Cluny et à la suite de cette histoire mon père, qui était furieux, m’a retiré de cet établissement pour m’inscrire au Lycée Français. Quant à l’Autre, je ne me souviens tout simplement pas de son nom !!
– quand l’enfant meurt de faim et de soif, oublié et enfermé dans son école la veille des vacances
Ceci est un drame réel que m’a raconté ma sœur, institutrice en Inde
5 : quels étaient les rapports entre français, indiens et anglais ?
Paradoxalement, l’occupation anglaise était moins dure car après la seconde guerre mondiale, les anglais avaient prévenu qu’ils ne resteraient pas en Inde. Il y avait d’ailleurs des calendriers qui décomptaient les jours restants avant leur départ. L’occupation française était plus problématique car ils n’avaient pas fixé de date de départ. Les anglais sont partis dés 1947 mais les français sont restés dans leurs comptoirs jusqu’en 1954. A la suite de cela, les indiens ont pu choisir leur nationalité et on a eu quelques surprises. Mon père qui était pro- français (policier) a opté pour la nationalité indienne alors que par exemple, un de mes professeurs qui défendait la culture indienne a choisi la nationalité anglaise !! A l’époque on ne pouvait rien prévoir.
6 : Pourquoi avoir choisi comme genre la Nouvelle plutôt que le Roman ?
Je n’aurai pas eu le courage d’écrire un roman tout entier. La nouvelle me paraissait idéale pour raconter des histoires inspirées des contes et légendes de mon pays ; C’était plus facile de s’inspirer de mon vécu. On raconte beaucoup mieux les choses que l’on connaît. Je trouve que mon recueil Mourir à Bénarès est le mieux fini alors que mes autres œuvres me laissent toujours une impression d’inachevé. Mon épouse pense qu’il est aussi le moins réussi car elle trouve que cette impression d’inachevé fait le charme de mes écrits.
7 : avez-vous écrit d’autres œuvres sous d’autres genres ?
J’ai écrit et mis en scène avec ma troupe une pièce de théâtre : le Mahabharata des femmes ou la malédiction des étoiles. Une lecture scénique en a d’ailleurs été donnée à la Réunion. Cette pièce me hante dans la mesure où j’ai du mal à m’en détacher. Les gens sont très demandeurs de cette représentation et du coup, j’ai du mal à passer à autre chose.
L’interview prend fin et les élèves présentent leur diaporama sur l’Inde dont la nouvelle étudiée les a inspirés.
C’est avec beaucoup d’émotion que M. Madavane découvre une photo de son ancien lycée. Il montre aux élèves les salles dans lesquelles il suivait les cours.
M. Madavane a enchanté les élèves par sa simplicité et son humilité. Un grand merci à cet auteur pour le temps qu’il nous a consacré et l’intérêt qu’il a porté aux questions et aux productions des élèves. Son interview et l’étude de son œuvre, ont permis de mieux cerner les problèmes liés à la colonisation de l’Inde
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Nous remercions M. BARET et M. PAYET P. pour leur aide dans nos recherches et dans l’élaboration du diaporama.
Un grand merci à M. GOVINDIN qui nous a fait découvrir cet auteur, et à Mme GAUTHER grâce à laquelle nous avons pu étudier le recueil de nouvelles Mourir à Bénares , inviter son auteur et pratiquer un interview.
Encore merci à M. LATRILLE qui grâce à sa disponibilité alimente ce site !!!